L’Esclavagisme Monétaire. Partie 2

On peut très bien se contenter de son sort d’esclave monétaire en se disant que, finalement, ca pourrait être pire. En effet, si on n’avait pas trouvé un système de création monétaire aussi souple que celui en place actuellement, ou en serions-nous ? Je ne prétends pas répondre à cette question pour l’instant, par contre je vais tenter de répondre à la question de savoir ou nous en sommes aujourd’hui.

Il y a deux économies, l’économie réelle dans laquelle nous vivons, qui fait tourner environ 5% de la masse monétaire mondiale (composée elle-même à 10% de monnaie fiduciaire – billets, pièces et comptes de dépôt – et à 90% de monnaie scripturale, ou « virtuelle » n’existant que dans les ordinateurs du système financier), et l’économie « virtuelle » ou « spéculative » dont les irruptions dans l’économie réelle sont dans l’ensemble catastrophiques.

Par exemple, la crise mondiale actuelle dont j’ai déjà parlé en (1).

Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Rappelons le mécanisme esclavagiste de la création monétaire : le système financier via les banques centrales répond à la demande de crédit d’un débiteur par l’émission de monnaie sans contrepartie (hors ratio prudentiel de quelques %) donc quasi gratuite, dont elle se sert pour obtenir un intérêt bien réel (calculé sur l’ensemble de la dette ainsi créée) et un droit de propriété sur les biens que ce crédit permet d’acquérir, tant que la dette n’est pas remboursée. Donc à peu près zéro effort et zéro risque côté créancier, et un maximum d’effort (pour rembourser la dette + intérêts) et de risque (de perte de ses biens) côté débiteur, l’esclave du système.

Ce système fonctionne à tous les niveaux, par exemple entre Etats créditeurs et Etats débiteurs. Le FMI et la Banque Mondiale furent créés en même temps que ce mettait en place ce système de création monétaire basé sur la dette. Il faut créer de la dette pour créer de la monnaie, ce qui permet ensuite de construire des infrastructures dans les pays dits en voie de développement.

L’idée est simple : l’institution crée une dette (qui ne lui coûte pas grand-chose), assortie d’un intérêt (qui lui rapporte quelque chose) envers un pays ayant besoin d’argent pour investir dans ses infrastructures. Infrastructures, bien sur, fournies par les industries des pays créanciers. Rien ne se perd.

Ces infrastructures réalisées, ce pays débiteur doit rembourser sa dette et donc imposer à son économie une rentabilité suffisante pour couvrir ses propres besoins, la dette, et les intérêts de la dette. Théoriquement, la valeur ajoutée venant des infrastructures doit permettre d’atteindre cet objectif. En pratique, une bonne partie de l’argent fourni est gaspillé (projets inefficients, corruption, guerres, etc..) et le pays débiteur se saigne à blanc pour essayer de rembourser sa dette. D’où pauvreté croissante par manque de moyens (entretien de l’infrastructure, santé, éducation…).

Le pays débiteur n’y arrivant pas, on fait un deal : il cède certains de ses actifs (droits d’exploitation du sous-sol, pétrole, certaines infrastructures) à ses créanciers, ce qui allège voir annule sa dette, mais permet à ces créanciers d’exploiter ces actifs pour leur propre compte. Donc on voit des zones très riches comme l’Afrique centrale se faire littéralement siphonner de leurs richesses sous les yeux de leurs habitants, qui crèvent de faim et de violences.

Je peints ici une image noire, la réalité est bien sur un peu plus nuancée, tous ceux qui travaillent pour les institutions financières ne sont pas d’horribles esclavagistes conscients de leur action. Mais c’est bien ce système qui permet aux USA (surtout) et aux pays dits riches en général de vivre au-dessus de leurs moyens, en s’appropriant à peu de frais les richesses d’autrui. Ce système est la continuation du colonialisme, la dette remplaçant le fusil. Fusil qui est d’ailleurs toujours près à revenir sur la scène si le pays visé ne veut rien entendre, comme en Irak. L’esclavagisme monétaire est un phénomène mondial.

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

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