Marée noire du golfe du Mexique: option nucléaire?

L’explosion le 20 avril de la plateforme Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique, en plus de la perte de 11 vie humaines, est le point de départ d’une gigantesque marée noire  causée par la rupture du puits immergé déversant entre 10 000 et 20 000 barrils de pétrole chaque jour, soit entre 1 250 et 2 500 tonnes par jour. L’Erika, en comparaison, transportait 37 000 tonnes.  Nous en sommes donc aujourd’hui à quelque chose de l’ordre de 120 000 tonnes échappées du puit.

La rupture du puits est une chose, mais la vraie raison technique du désastre est que le bloc obturateur de puits ou blow out preventer (BOP) n’a pas fonctionné. Cet outil massif situé à l’émergence du puits, dans le cas qui nous occupe, est de type “Blind Shear Ram” et est supposé fermer définitivement le puits à l’aide d’un pince géante. Cela n’a pas marché, malgré les essais désespérés des ingénieurs  de BP pour trouver la panne. Or ce système est vanté par l’industrie pétrolière comme étant la ligne de défense ultime, la sécurité absolue. Pourtant une étude fouillée du New York Times monte qu’il existe plusieurs exemples de dysfonctionnement de ce type de système, et que la bonne pratique actuelle recommandée par le Minerals Management Service est de placer un double système.

Les tentatives de “caping” du puits ayant échoué, BP est actuellement en train de forer deux nouveaux puits à proximité du premier puits, mais même en travaillant nuit et jours sans problèmes particuliers if faudra attendre fin juillet pour installer les 18 000 pieds (env. 5 400 m) de tuyauterie en eau profonde pour qu’au moins un des puits soit en mesure d’injecter les tonnes de boues et de ciment à haute pression afin de boucher ce premier puits.  Pour l’instant, d’immenses torchères en mer brûlent une partie du gaz et du pétrole rejeté par le puits et récupéré par un système auxiliaire, le reste noyant les côtes du golfe et les bayous de Louisiane sous une gangue cauchemardesque dont nul ne sait combien de temps, d’efforts et de moyens il faudra pour s’en débarrasser.  Fin juillet, au rythme actuel, c’est à peu près l’équivalent de cinq Erikas qui se seront répandus dans le golfe. Peut-on attendre?

Il existe une autre voie pour stopper le puits, apparemment testée par les Russes et aujourd’hui proposée à l’administration américaine: une explosion atomique sous-terraine, à côté du puits. Une petite bombe  (environ trois fois Hiroshima) suffirait pour écrouler le puits sur lui-même et le sceller définitivement. Les Soviétiques puis les Russes ont utilisé cette technique cinq fois, avec un seul ratage en 1972.  Le risque de dissémination d’élément radioactifs est “relativement” faible (20% quand même selon l’article du NYT), l’explosion étant contenue sous terre. Le choix nucléaire plutôt que conventionnel n’est pas explicité, mais semble être lié au fait que les tubes d’accès ne sont pas assez large pour contenir une charge explosive conventionnelle suffisante.

On voit sur la vidéo soviétique ci-dessous, d’époque, une tentative réussie de fermeture de puits fou.

Désespérément à la recherche de solutions, Barack Obama a rassemblé une équipe d’experts en nucléaire et de géologues pour analyser cette option, comme l’indique cet article du Telegraph. Option qui semble, selon cette source et si BP n’arrive pas à colmater le puits, tout à fait réaliste et “moins pire” d’un point de vue environnemental, économique et politique  que de laisser couler le pétrole pendant encore des mois.

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

4 réponses

  1. […] Ensuite, les troublantes coïncidences affairistes : selon le site PressTV des procès visent actuellement Halliburton (société de service et d’ingénierie du pétrole, grand bénéficiaire de la guerre an Iraq, et dont le patron étati Dick Cheney avant qu’il ne devienne le vice-président de G.W. Bush…) pour malfaçon dans le capping du puits (voir ce précédent billet). […]

  2. Loïc

    N’y a-t-il pas un risque d’agrandir le puits de forage existant, compte tenu des pressions incroyables qui règnent à de telles profondeurs en ébranlant les strates du sous sol, et de faire rentrer de l’eau dans la nappe qui peut du coup se transformer en cocote-minute (à cause de la chaleur aussi très élevée à ces profondeurs) ? Ça fonctionne peut-être sur terre, mais sous la mer, cette technique me semble incroyablement dangereuse… déjà que ça fuit de partout autour du puits (preuve de la faiblesse du sous-sol et du tôt de pression extraordinaire de la nappe, il me semble) ! moi, à leur place, si je prenais la décision de le faire, je ferai évacuer les côtes pendant plusieurs jours… en prévision d’un tsunami qui pourrait même sans doute se répercuter en Islande ou en Europe… Je vais annuler mes vacances sur le littoral atlantique… sont trop dangereux les gens d’en face. non ?

  3. Vincent

    Les risques ne sont pas nuls, c’est certain. Et cette option se semble pas d’actualité pour l’instant. Je viens de passer 10 jours sur la côte Atlantique, pas de soucis 🙂

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