Christine Lagarde à la tête de FMI, pour le meilleur ou pour le pire?

Voilà c’est fait, Christine Lagarde remplace DSK à la tête du FMI. La course engagée entre elle et le mexicain Agustin Carstens s’est terminée en sa faveur grâce au Secrétaire au Trésor Américain Tiomthy F. Geithner, citant son “talent exceptionnel et large expérience” et garantissant surtout la continuité d’une tradition datant de la naissance du FMI: ses directeurs généraux  sont toujours des Européens. Etat de fait que les “pays émergents” auraient bien voulu changer en appelant à la nécessité d’un regard neuf, mais rien n’y fit. Et ce malgré les forts soupçons de magouille qui pèsent sur Mme Lagarde dans l’affaire Tapie, telle rapportée par Médiapart. Mais bon chacun sait depuis la crise des subprimes et les bonnes affaires de la Goldman Sachs sur le dos des Grecs que la haute finance et la magouille s’entendent comme cul et chemise.

Le souci actuel majeur du FMI est bien sur la dette grecque et la situation critique que l’on sait malgré les 110 milliards d’euros du kit de sauvetage apportés l’an dernier. Situation qui a une origine essentiellement politique: la Grèce ne rencontrait pas les critères nécessaires à l’accession au système monétaire européen, mais y fut néanmoins admise pour des raisons uniquement politiques balayant sous le tapis les inévitables problèmes financiers qui s’ensuivraient. Aujourd’hui, face à la crise prévisible de longue date, est-ce que le FMI est vraiment l’instrument d’une réponse adaptée, sachant qu’il s’agit d’un problème fondamentalement politique et interne à l’UE? On peut légitiment craindre un exercice de pose d’emplâtre sur une jambe de bois, comme le dit en d’autres termes Simon Tilford, économiste en chef du Centre pour la réforme européenne à Londres: “la crédibilité du FMI est menacée par la mise en oeuvre d’immenses ressources humaines et financières pour régler un problème politique”.

Christine Lagarde complique ainsi une situation déjà très complexe: les banques françaises étant les plus exposées à la dette grecque (environ 65 milliards d’euros, selon la Bank for International Settlements), on peut douter de l’impartialité d’une présidence française du FMI. En tant que Ministre des Finances françaises, Lagarde avait au départ adopté une ligne dure envers les Grecs, menaçant même de retirer à la Grèce toute assistance financière si le pays ne mettait pas en oeuvre ses engagements de coupes budgétaires et d’augmentation de ses revenus. Elle ainsi que l’ensemble des dirigeants européens  sont accusés (entre autre par Geithner) de n’avoir pas pris les bonnes décisions à l’époque et de tenter aujourd’hui de redresser la barre via le FMI. Lagarde est officiellement opposée à la restructuration de la dette grecque, mais il est probable qu’elle se rende compte maintenant que c’est finalement dans l’intérêt des banques françaises d’en passer par là, la ligne dure ne faisant qu’amplifier le problème.  D’ailleurs ce lundi la France proposait un plan auprès des banques françaises pour la replanification des remboursement grecs prévus au cour des trois années à venir.

Prenant ses fonctions à Washington le 5 juillet, nous verrons dans les semaines qui viennent quelle sera l’attitude de Christine Lagarde face face au maelström actuel des finances européennes, et si elle rend effectives ses promesses d’ouverture envers les pays émergents.

Comme le dit Paul Krugman sur son blog, la situation actuelle demande de l’ouverture, de l’imagination et surtout pas la pensée “sérieuse et raisonnable” classique (réduction des déficits, contrôle de l’inflation à tout prix) dont le résultat ne serait qu’un continuel embourbement. Il s’inquiète du fait que Lagarde, justement, fait partie de ces gens réputés sérieux et raisonnables…

 

 

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

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