Syrie: le loup islamiste sort du bois

On ne parle plus trop de la Syrie depuis que le Mali lui a momentanément volé la vedette dans la catégorie hypocrisie et enfumage. Ça tombe bien car l’image que veulent nous laisser nos chers dirigeants de la Syrie, un combat entre de courageux rebelles aidés de quelques gentils barbus et du support politique de pays affamés de liberté et de démocratie (hé hé, voir cet article)  contre l’atroce Assad,  a du plomb dans l’aile.

Non pas que Assad se soit soudainement révélé comme un bon démocrate, non c’est un dictateur typique du coin, mais son refus de partir encore réitéré tout récemment s’assied notamment sur le fait que “la rébellion” est constituée de deux groupes que tout sépare mais qui se sont allies temporairement pour abattre un ennemi commun – Assad. D’un côté les “rebelles légitimes” si on peut dire, qui veulent un changement de régime en Syrie, quelque chose de beaucoup plus “démocratique” et se rendent compte qu’ils ne peuvent l’obtenir que par la force. De l’autre, les jihadistes, islamofascistes, mercenaires et pirates en tous genres plus ou moins regroupés sous la bannière Al-Quaeda, qui veulent créer une nation islamiste pure et dure.

Jusque là rien de nouveau  et on était supposé croire que les chefs de ces deux groupes allaient pouvoir trouver un consensus sur l’après-Assad. Mais l’enfumage prend l’eau, car même si on ne peut guère douter de la bonne foi des “rebelles légitimes” il est par contre devenu évident que les islamistes n’ont rien à faire de l’avenir de la Syrie et sont là pour massacrer et piller. Ce qui est normal pour des pirates, quelle que soit leur religion d’ailleurs. A tel point que, dans le Guardian du 17 janvier traitant du champ de bataille d’Aleppo conquis collectivement par les islamiste de Jabhat al-Nusra et les rebelles syriens,  un chef de guerre rebelle avouait que “nous les (Al-Nusra, ndt) combattrons le jour qui suivra la chute d’Assad, et d’ici là nous ne collaborerons plus avec eux“. En effet, la milice de Al-Nusra passe son temps à piller les infrastructures publiques de Aleppo, sous le regard horrifié, et pour l’instant impuissant, des rebelles syriens.

Sachant cela, Assad parie sans doute que les deux groupes en viendront à s’entre-tuer bien avant de l’avoir mis à terre, s’il arrive à bien jouer ses dernières cartes – à commencer par le refus définitif de toute idée de capitulation. Cette situation ne semble pas avoir été prévue par les imbéciles du Quai d’Orsay qui vont se trouver mal quand leur rebelle de poulain va leur exploser à la figure… à moins que, comme dans le cas de l’Irak, de la Libye ou encore du Mali, il ne s’agisse là que d’un jeu à tiroirs, d’un jeu de dominos opportuniste où rien n’est ce qu’il semble être?

En effet l’Irak fut attaqué après un montage de fausses “preuves” par l’administration Bush (et, surtout, la CIA) de l’existence d’armes de destruction massive et d’un accord entre Saddam Hussein et Al-Quaeda. Tout ça dans le but d’éliminer SH qui devenait encombrant (toutes ces photos du méchant dictateur serrant les pinces des bons américains et européens…)  et récupérer le pétrole irakien. La Libye fut attaquée par Sarko pour se venger de l’humiliation subie lors de la visite de Kadhafi à Paris (grand moment!), enterrer ses histoires de financement de campagne et, tant qu’à faire, récupérer tout ce qui pourrait traîner dans le sous-sol Libyen pour payer les faux frais de ce genre d’opération. Opération qui eut pour effet secondaire de renvoyer vers le Mali, fortement armées, des bandes Touaregs (notamment) ayant auparavant fuit le Mali vers la Libye de Kadhafi et l’Algérie, et nourrissant désormais la force islamiste séparatiste du Nord-Mali que la France combat actuellement. Rebelote. Avec toujours le même résultat: la déstabilisation et le chaos, le spectre de la Charia, et l’omniprésence de représentants des industries du pétrole et de l’armement qui, graissant les bonnes pattes, s’approprient à bon compte les ressources locales pendant que les gens achèvent de crever.

Pour faire court, le système prédateur occidental crée constamment les conditions nécessaires à sa survie. Pour ce faire il a besoin de dictateurs qui pourront, selon les besoins du moment, servir d’alliés ou de bouc émissaires. Il a besoin d’idiots utiles sous la forme de mercenaires islamistes (les terroristes) faciles à acheter et à pointer vers tel ou tel théâtre, dont les actions justifieront ensuite une intervention des pays “démocratiques”. Il a besoin de politiciens corrompus, de médias aux ordres, et de la présence continuelle d’un certain niveau d’anxiété dans sa propre population (terrorisme, chômage, crise financière, grippe, tout est bon) afin d’affaiblir toute pensée critique de masse.

 

 

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

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