Hier soir le Cercle Côte d’Opale Synergie organisait un grand débat public au théâtre Monsigny sur l’identité, l’attractivité et l’avenir de la Côte d’Opale, une région aux frontières relativement floues mais comprises quelque part entre la Belgique et la baie de Somme côté maritime, et s’enfonçant jusque Saint-Omer côté terrestre.
Salle comble et qualité des présentateurs et invités pour une soirée animée sans trop de langue de bois et de poncifs, à l’exception d’un politique calaisien qui n’avait visiblement pas compris qu’il ne s’agissait pas d’un meeting électoral. Trois plateaux se sont succédé pour commenter les sondages et analyses réalisées par le CCOS.
D’abord le trio constitué par Bruno Bonduelle (ancien président du groupe homonyme bien connu, ancien président de la CCI (Chambre de Commerce et d’Industrie) Grand Lille, et auteur d’un livre « 25 propositions pour en finir avec le déclin » dans lequel il distille ses idées pour redynamiser la région NPDC et, entre-autres, la Côte d’Opale), Sabine Lhermet (OT de Dunkerque) et Isabelle Mislanghe (Agence Côté Soleil, organisatrice de voyages et congrès de par le monde mais basée à Boulogne-sur-Mer).
Le second plateau était composé de Jean-Jacques Durand (Groupe Najeti, gérant de plusieurs hôtels et golfs sur la Côte d’Opale), Christine Nacry (CCI Côte d’Opale) et Philippe Vallette (Directeur de Nausicaa).
Enfin un troisième plateau avec François Decoster (nouveau Maire de Saint-Omer), Mireille Hingrez-Cereda (Première adjointe au Maire de Boulogne-sur-Mer) et Romain Olivier (successeur de son père, fondateur des Fromages Philippe Olivier).
Les débats ont beaucoup tourné autour de l’attractivité touristique de la Côte d’Opale, avec des points de vue assez contrastés: Mr Bonduelle y voit une zone en friche malgré son énorme potentiel; Mr Durand estime qu’elle est mal représentée par les institutions en charge de son développement et qu’il est donc difficile de faire venir le tourisme au-delà de ses frontières immédiates. A contrario Mmes Lhermet et Mislanghe, ainsi que Mr Vallette, dressent un portrait bien plus positif de la situation actuelle tout en reconnaissant qu’il reste énormément à faire pour “packager” le “produit” Côte d’Opale et le rendre visible et attractif aux 50 millions de riches visiteurs potentiels venant de Londres, Paris ou Bruxelles – trois capitales à moins de 3 heures de route d’ici! Non pas que la Côte d’Opale soit terra incognita pour ces populations, il suffit de voir le nombre de belles voitures immatriculées en Belgique qui défilent de Wissant au Crotoy chaque long week-end pour s’en rendre compte, mais les acteurs en appellent à une montée en gamme: plus d’hôtels de luxe, plus de professionnalisme (accueil généralisé en anglais mais aussi en néerlandais et allemand), plus de présence médiatique.
Mr Vallette a bien recadré la question de la captation de ces flux en expliquant que les flux, justement, ne se captent pas: ils s’organisent en amont. Si des touristes allant de Londres à la Normandie passent par ici en se disant que ça à l’air sympa et qu’il faudrait s’arrêter un jour, ils ne s’arrêterons jamais si on arrive pas à faire en sorte que la Côte d’Opale deviennent une escale prévue à l’avance plutôt qu’une opportunité de passage. Il a également laissé entendre que la future extension de Nausicaa devait permettre de doubler l’apport économique à la ville de Boulogne, évalué aujourd’hui à 30 million d’euros annuels. Estimation dont il est difficile de connaître la pertinence réelle…
Cela dit, à mon humble avis, la Côte d’Opale n’a aucun avenir – et tant mieux – en termes de tourisme ostentatoire, hors peut-être le Touquet par pure tradition: frimer en vedettes rapides et voitures de sport décapotables, ou servir le champagne en terrasse au coucher du soleil en compagnie de jolies dames botoxées implique la garantie qu’il fasse beau et chaud au moins six mois par an, et là ca ne risque pas d’arriver même avec le réchauffement climatique!
Un sujet fut mis sur la table par Mr Bonduelle, à ma grande surprise d’ailleurs: la plaisance, ou l’arlésienne de Boulogne-sur-Mer. Il en appelle à un grand développement sur Boulogne, faisant écho aux déclarations de Mr Cuvillier lors des derniers voeux de la CAB pour un port de 2000 anneaux – auquel personne ne croit, déjà que les 100 anneaux supplémentaires prévus au bassin Napoléon ont dix ans de retard… mais halte aux mauvaises langues! Il se passe des choses, il existe une collaboration et un concept “Ports de plaisance de la Côte d’Opale” et, comme le rappelait notre ami Bertrand Fetel qui pris la parole depuis la salle, il existe plusieurs types de plaisanciers qui n’ont pas du tout les mêmes besoins.
La question de la “concurrence” entre un développement plaisance et le port de commerce, certes moribond, de Boulogne a aussi resurgit, Mme Nacry – et d’autres dans la salle – en appelant à garder ce port en vie et doutant de la pertinence économique de la plaisance. Personnellement je ne vois pas pourquoi la plaisance et le commerce seraient mutuellement exclusifs, une réorganisation de l’avant-port et des bassins actuels pouvant permettre un beau développement du premier sans nuire au second.
Outre le tourisme, le débat porta aussi sur le développement économique pur et dur et l’attractivité de la Côte d’Opale pour les entreprises. Le sondage CCOS montrait que la Côte d’Opale était plutôt bien perçue: qualité de vie, qualité des formations disponibles sur place, accessibilité mais avec le bémol de liaisons ferroviaires trop chères (ça, c’est clair) et du manque d’aéroport local d’envergure. Autre point noir, une image plutôt négative véhiculée par les habitants de la Côte d’Opale à son égard et un classement de Calais et Boulogne parmi les villes les plus pauvres de France.
Les invités en appelaient en coeur à un autre regard de la population sur cette région (pour Mr Vallette, le sentiment de morosité à l’égard de sa propre région est un sentiment qui se retrouve partout en France, ici comme à Marseille, donc dénué d’objectivité) et, à l’image d’un Romain Olivier qui arrive à vendre ses fromages “Vieux Boulonnais” dans les palaces de Hong Kong, de retrouver cohésion et fierté pour un développement bénéfique à tous.
Enfin, un membre de la salle apparemment bien au fait des choses porta le débat sur la culture et son constat de l’existence d’une offre importante, ainsi que de sa découverte d’une ville locale, Saint-Omer, a ses yeux aussi belle que sa propre ville d’origine d’Aix-en-Provence mais inconnue de tous. Ce qui ne manque pas de faire réagir son nouveau Maire, Mr Decoster, qui indiqua être bien d’accord avec ce constat et d’avoir la ferme intention de développer l’attractivité de Saint-Omer et de résorber ainsi une partie du chômage (28%) qui la touche.
La dernière partie du débat portait sur le projet de création d’une “marque” Côte d’Opale, à l’instar de ce que l’on voit de plus en plus souvent ailleurs: “OnlyLyon” à Lyon, “MADrid about you” pour Madrid, et pleins d’autres exemples. Chantier sur lequel l’ensemble des participants semblait intéressé de travailler, certaines telle Mme Nacry ayant déjà des slogans en tête, mais comme le rappelait très justement Mme Lhermet: avant d’avoir une marque il faut un produit, donc commençons par bien structurer le contenu et l’offre “Côte d’Opale”.
Le Président de CCOS, Mr Johann Duhoo, clôtura ce grand débat en récapitulant les avis exprimés et invitant à poursuivre le travail.
Félicitations et merci à toute l’équipe du CCOS et à leurs invités!
=Vincent Verschoore=