Ah la matière noire, arlésienne de la recherche cosmologique, invention requise pour boucher un gros trou dans le modèle standard de l’univers ne pouvant résister autrement face à ces galaxies qui ne pourraient exister telles quelles si la gravité était seule en lice.
Ce blog revisite le concept de matière noire au gré des recherches, théories et parfois découvertes scientifiques sur la composition de notre univers, un sujet aussi vaste qu’affolant pour les chercheurs de tous poils. Cette matière noire, initialement théorisée dans les années 70 sur base d’observations réalisées dans les années 30, est depuis lors soumise à d’importants efforts de détection. Sans grand succès. Ce qui invite à la remise en cause régulière de l’existence même de cette matière fantôme, et à des hypothèses permettant de s’en passer tout en “collant” avec les observations.
Aucune n’est parfaite, l’une des meilleures étant la théorie MOND modifiée, sur laquelle ce blog propose évidement un article (1). Mais voici que le chercheur français du CNRS Gabriel Chardin propose un autre modèle encore plus radical, le modèle dit de Dirac-Milne qui postule l’existence de masses comparables de matière et d’antimatière dans l’univers, l’antimatière ayant ici la caractéristique particulière de posséder une masse négative. Et c’est cette masse négative qui agirait sur les masses positives – les masses visibles, étoiles et galaxies – pour obtenir les effets gravitationnels que l’on observe, et que l’on attribue à tort à cette fameuse – et in fine inexistante – matière noire.
C’est audacieux car une des hypothèses fondamentales du modèle standard est que la totalité de l’antimatière, créé aux premiers instants de l’univers en parallèle avec la matière “normale”, se serait rapidement désintégrée au contact de celle-ci et que ce que nous voyons ne serait que la matière ayant survécu à cette désintégration. La question de pourquoi il y aurait un peu plus de matière que d’antimatière (sinon tout aurait disparu) est d’ailleurs une autre question fondamentale sans réponse définitive.
Ce modèle de Dirac-Milne ferait ainsi d’une pierre deux coups: il résoudrait le problème de la disparité matière-antimatière du fait qu’il existerait en réalité autant de l’une que de l’autre, mais que nous ne voyons pas l’antimatière car elle est répartie dans les “vides” intersidéraux. Et il résoudrait le problème de la nature de la matière noire en postulant une masse négative pour l’antimatière, lui conférant ainsi les caractéristiques requises pour coller aux observations.
La notion de masse négative est un peu exotique, mais nous avons bien des charges électriques positives et négatives, et une telle propriété pour la masse ne viole en rien les fondamentaux physiques. La masse, pour rappel, est une propriété associé au champ de Higgs – source du fameux boson de même nom identifié en 2012 (2) – et qu’il n’y a aucune raison en principe pour qu’elle ne fonctionne pas aussi “à l’envers”, créant une répulsion entre les masses négatives (ni plus ni moins de l’anti-gravité), avec pour effet que l’antimatière puisse exister sous forme de grands nuages de gaz très peu denses.
Un autre effet associé à des masses négatives et positives est la polarisation de l’univers (un peu comme un aimant gravitationnel, avec un pôle + et un pôle -), qui modifie les équations de la gravité et les rapproche grandement de celles issues du modèle MOND introduit ci-dessus. Je vous invite à lire l’article sur le MOND, où l’on parle aussi des Jedis, mais en deux mots le modèle MOND implique que la force gravitationnelle diminue avec la distance – ce qui va à l’encontre de l’idée que la gravité doit être la même partout. Dans un univers gravitationnellement polarisé, la force de gravité changerait effectivement selon la distance entre les masses positives et négatives.
La première expérience à faire est donc de mesurer la masse d’une particule d’antimatière, chose compliquée car autant les scientifiques sont capables de créer de l’antimatière en laboratoire, autant celle-ci ne survit pas longtemps et la mesure de sa masse une entreprise techniquement très complexe. Mais ils y travaillent et il est possible qu’en fin 2018 nous ayons déjà des mesures avec les expériences Gbar, Alpha-g et AEgIS au CERN. Si le résultat est positif, et la masse de l’antimatière donc négative, ce serait un pas de géant vers une solution acceptable au mystère de la matière noire.
Notes
(1) https://zerhubarbeblog.net/2014/05/09/un-autre-mond-est-possible/
(2) https://zerhubarbeblog.net/2012/07/04/decouverte-du-boson-de-higgs-un-grand-jour-pour-la-physique/
Source: https://lejournal.cnrs.fr/articles/un-univers-sans-matiere-noire-0
Bonjour Vincent,
L’énergie sombre, appelée aussi l’énergie du vide, existait-elle avant le Big Bang ? Le Big Bang est-il né de l’énergie du «vide» ?
Certains pensent que l’énergie sombre est apparue avec le Big Bang. Pour ma part je ne le crois pas. Je pense que l’énergie du vide existait avant, s’étendant à l’infini. En fait, c’est l’énergie du vide qui contient l’espace-temps de notre univers. Lorsque notre univers est apparue, après le Big Bang, au sein de l’espace-temps, elle est passée comme inaperçue à cause de la densité de la matière ordinaire mais au fur et à mesure de l’expansion de notre univers, elle est redevenue de plus en plus présente repoussant de plus en plus vite la matière baryonique des galaxies, des amas de galaxies.
On cherche à l’intérieur des galaxies et des amas une masse attractive (matière noire) pour expliquer la cohésion et la vitesse de rotation de ces galaxies, alors qu’il faut peut-être chercher à l’extérieur des galaxies et amas une force répulsive qui permettrait d’expliquer le phénomène. Je pense que la matière noire n’existe pas ; supposée (mais jamais révélée ou prouvée) pour expliquer cette rotation des galaxies, je pense que c’est plutôt l’énergie sombre qui empêche la dispersion des étoiles des galaxies, maintenant leur cohésion et leur vitesse. Que connaissons-nous de l’univers ? A peine 5% représentant la matière ordinaire. Nous ignorons tout des 95% restant ! Méfions-nous de nos certitudes !
L’énergie sombre règne sur l’univers. Je pense que c’est elle qui limite la vitesse de propagation des ondes électromagnétiques, qui contraint les masses de matière ordinaire. De quoi est-elle constituée ? Mystère ! J’imagine sa fréquence infinie. Sa vitesse de propagation serait instantanée (en fait, c’est comme si elle était partout en même temps, au même moment ! Cela permettrait entre autre d’expliquer l’intrication quantique* de deux particules qui, quelque soit leur distance, se comporte comme si elles étaient une seule, leur état pouvant varier simultanément et instantanément, même à des années-lumière l’une de l’autre !
Si la densité de l’énergie sombre augmentait au fur et à mesure de l’accélération de l’expansion de l’univers, toute la matière, jusque dans ses atomes, se désintégrerait laissant un univers (infini ?) complètement vide de matière baryonique mais avec une densité de l’énergie sombre tendant à l’infini et qui générerait peut-être un nouveau Big Bang, surgissant de l’énergie du vide devenu hyperdense, comme une singularité créatrice de matière…
*L’intrication quantique est un phénomène non local, 2 systèmes intriqués forment un tout qui ne dépend pas des positions dans l’espace de 2 particules intriquées. Même Einstein n’a pu s’y résoudre ! Niels Bohr avait raison ! Quelle que soit la distance de 2 particules intriquées, toute modification de l’état de l’une entraîne la modification de l’autre instantanément (donc plus vite que la vitesse de la lumière !) La preuve en a été apportée en 2013 sur 1300 mètres (Expérience de Bell par Ronald Hanson, université de Delft, Pays Bas) puis en 2017 par les chinois depuis un satellite à des stations terrestres distantes de 1400 km
Qu’en pensez-vous?
Alain Guillerme.
Bonjour Alain. L’énergie sombre générant l’expansion de l’univers elle aurait plutôt tendance à éparpiller et désintégrer les galaxies. Mais de manière générale tous ces concepts, ainsi que les idées d’infini et de singularité, soulignent bien plus notre incompréhension de la mécanique de l’univers que de faits concrets.
Bonjour Vincent,
Vous me dites que l’énergie sombre générant l’expansion de l’univers aurait plutôt tendance à éparpiller et désintégrer les galaxies !
C’est faux pour la bonne raison qu’à l’extérieur des galaxies, le vide et donc la densité de l’énergie sombre est plus importante qu’à l’intérieur de ces galaxies où la densité de la matière baryonique est très élevée et l’énergie du vide nettement moins importante. De ce fait, l’énergie sombre exerce une force répulsive (une anti gravité) sur la matière ordinaire les constituant, les empêchant de se disperser ! C’est un peu comme avec l’effet Casimir, dans le vide, les plaques se touchant presque se rapprochent, la pression exercée sur les faces extérieures est plus grande que celle se produisant entre les plaques. Ceci est aussi valable à l’échelle atomique où le vide (très important par rapport à la matière) entre les particules ne les désintègre pas mais les contient…
Voir « le vide est la matrice de tout » par l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan.
Cordialement
Alain
Bonsoir Alain, il me semble que c’est la gravité qui est plus forte au centre des galaxies, et non que l’énergie noire l’y serait moins. Je ne vois pas comment vous pouvez dire que l’énergie noire exerce une force antigravitationelle (ce qui est vrai) tout en s’opposant a leur dispersion, alors que c’est justement la gravité qui empêche cette dispersion?
Bonsoir Vincent, j’ai l’impression que nous avons du mal à nous comprendre! Quand je dis que l’énergie noire exerce une force répulsive, c’est depuis l’extérieur des galaxies VERS les galaxies les empêchant de se disperser tout en maintenant la vitesse de rotation des étoiles périphériques que la seule gravité de la matière baryonique de la galaxie ne suffit pas à expliquer. C’est bien pour cela que les astronomes ont inventé la matière noire ! En même temps l’énergie sombre “creuse” l’espace entre les galaxies et les amas dans une expansion accélérée et plus il y a de vide, plus l’énergie sombre se renforce … à suivre…
Cordialement
Alain
Mais pourquoi rechercher l’exotisme (WIMP, MOND, masse négative…) quand la Relativité fournit une explication simple avec l’horizon des événements dû à l’accélération? Un objet chargé rayonne s’il est accéléré (accélération a), mais il s’enferme dans une bulle de diamètre c²/a et l’observateur ne peut le voir s’il est assez loin. Pourquoi n’en tient-on pas compte? Lire le livre de Perdijon, “La Matière noire: substance exotique ou effet relativiste?” publié en 2015.
[…] Masse négative ou matière noire? 7 juin 2018 […]
Voici une théorie des plus pertinentes : la matière noire ne serait qu’une extension de la création de paire !
Ci-joint la vidéo qui l’explique :
Théorie scientifique ou erreur humaine ? Qu’en pensez-vous ?
[…] des hypothèses « alternatives » telle la gravité entropique (2), la masse négative (3),un univers miroir dont la matière noire serait le signe (4), ou encore une version du modèle […]