Fait chaud et l’Arctique fond…

Des dizaines de morts dues à la chaleur au Japon, en Corée, des feux parfois mortels en Grèce, en Suède, en Californie, un printemps particulièrement chaud en Australie. 30°C au cercle polaire, et 51°C dans le Sahara mesuré le 5 juillet, record absolu pour l’Afrique. En Angleterre, les éoliennes sont à l’arrêt faute de vent. Que peut-on en dire outre qu’il fait chaud, très chaud, trop chaud un peu partout sur Terre?

Une cause physique de cette chaleur dans l’hémisphère Nord est le ralentissement, sinon l’arrêt, du jet stream, ce courant aérien qui serpente autour de cet hémisphère à une altitude d’environ six kilomètres. L’activité du jet stream est fonction de la différence de température entre l’équateur et l’Arctique, l’air froid descendant vers le Sud et l’air chaud montant vers le Nord.

Or il fait très chaud actuellement dans l’Arctique, qui se réchauffe à une vitesse à peu près double de la vitesse moyenne de réchauffement de la planète. Cette diminution d’apport d’air froid ralentit donc le jet stream, installant une sorte de boîte chaude sur nos têtes. Et selon divers services météo dont le DWD allemand, cette situation va continuer pendant encore au moins deux semaines, voire bien plus longtemps.

Ce n’est pas la première fois que cela arrive au cours des dernières décennies, et à chaque fois se pose la question de la cause de cette situation: cas particulier ou effet du réchauffement global? Les vagues de chaleur étant un élément central des effets présumés de ce réchauffement la corrélation n’est pas difficile à voir, mais la causalité réelle? Une collaboration entre diverses agences météo dont Météo France, nommée EUPHEME (EUropean Prototype demonstrator for the Harmonisation and Evaluation of Methodologies for attribution of extreme weather Events) (1), développe des outils d’analyse visant à vérifier cette causalité, à confronter le mieux possible les phénomènes météorologiques observés aux modèles climatiques.

Au Royaume-Uni, l’été chaud de 2017 fut analysé et dès le mois de septembre le World Weather Attribution Project (2), un projet collaboratif visant à attribuer, en quasi-temps réel, une cause aux phénomènes rencontrés, augmentait d’un facteur dix la probabilité d’un été 2018 au moins aussi chaud que 2017. Jusqu’ici ils ne se sont pas trompés.

Ce 10 juillet Springer publiait en ligne une étude intitulée Rising Oceans Guaranteed: Land Ice Loss and Sea Level Rise (Montée des océans garantie: perte de glace continentale et montée du niveau des mers), visant à mesurer la perte de la masse glacière terrestre dans l’Arctique, dont le Groenland, et l’effet sur la montée des eaux (3). La conclusion de l’étude est que la fonte rapide de la glace arctique est une réalité, avec la conséquence inévitable d’une montée des eaux.

L’Arctique contient trois millions de kilomètres cube de glace terrestre, dont 97% au Groenland. Selon l’étude, sur la période 1880 – 2012 la température moyenne de cette région a augmenté de 3,5 °C, contre 0,85°C pour la planète en général. La perte de masse glacière aurait débuté courant des années 90, et subirait actuellement une accélération massive: sur la période 2003-2013 elle aurait été de l’ordre de 218±58 gigatonnes par an avec une accélération de 25 gigatonnes d’une année sur l’autre, contribuant à une élévation du niveau marin de l’ordre de 0,8 mm annuel.

Ce réchauffement a un impact sur l’atmosphère, sur la température de l’air, donc sur le jet stream et notre climat local européen. Indépendamment du débat sur la cause de ce réchauffement, anthropique ou naturel (4), en dépit de l’auto-satisfaction des grands messes à méga-empreinte carbone (5), il semble que nous soyons confrontés à ses effets bien réels, et ce plus vite que l’on pouvait le penser: les alarmes sont en général plutôt réglées sur 2050 que sur 2018. Il va donc falloir résister.

Vivre dans un climat oscillant entre le très froid en hiver et le très chaud en été implique une réflexion sur nos modes de vie, sur l’architecture de nos espaces de vie, sur nos modes de transport, sur notre alimentation. Construire des bâtiments en verre dont la viabilité en été dépend d’immenses et gloutonnes installations de conditionnement d’air, systèmes qui eux-mêmes rejettent énormément de chaleur (5) – ce qui est un comble – présente un problème de bon sens.

Le modèle de base d’une habitation résistante à la chaleur est un cube construit en matériau isolant et lent à emmagasiner la chaleur (donc plutôt épais), avec peu de fenêtres côté Sud, et maximisant la circulation d’air nocturne. Les persiennes ont un bel avenir devant elles! De nombreux sites donnent par ailleurs des conseils pour construire et vivre dans un monde plus chaud (7).

L’avenir sera t’il un retour à un bon sens traditionnel, ou une course technologique vers des solutions “miracle” telle la vache OGM résistance à la chaleur (8)? Sans doute un peu des deux, la technologie de pointe ayant compris qu’elle avait beaucoup à apprendre des innovations naturelles (9). Mais il faudra également faire avec les intérêts particuliers qui, parfaitement intégrés aux leviers du pouvoir de la plupart des pays, tenteront toujours de faire du profit à court terme aux dépens du bien commun.
Notes.

(1) http://www.jpi-climate.eu/nl/25223456-EUPHEME.html

(2) https://www.climateprediction.net/weatherathome/world-weather-attribution/

(3) https://link.springer.com/epdf/10.1007/s40641-018-0107-0

(4) https://zerhubarbeblog.net/2017/08/23/remise-en-cause-du-co2-dans-le-rechauffement-climatique/

(5) https://zerhubarbeblog.net/2017/11/08/entre-cop23-et-terre-plate/

(6) https://rmets.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/joc.3415

(7) https://fr.wikihow.com/rester-frais-lorsqu%27il-fait-chaud

(8) https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/vache-vache-ogm-resister-climats-plus-chauds-67833/

(9) https://theconversation.com/how-modern-technology-is-inspired-by-the-natural-world-79629

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

8 réponses

  1. Bonjour,
    Je tombe sur le blog de Christophe Cros Houplon (sur lequel il y a à prendre et à laisser mais qui est très intéressant) sur des allégations perturbantes concernant un certain projet HAARP, Bluebeam et les Chemtrails, domaines où je n’ai aucun point de référence.
    Je ne me souviens pas si vous en avez parlé, mais, connaissant votre côté mesuré, je serais curieux d’avoir votre point de vue. Peut-être un article ? (ou un lien)

      1. Merci. Votre réponse m’aide à résoudre momentanément le dilemme qu’il y a entre s’informer, éventuellement s’instruire, et se tenir éloigné d’informations/rumeurs anxiogènes.

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