Brexit Poker 22: Les Brexitmen!

Ce vendredi 31 janvier 2020, 11h00: la délégation britannique quitte le périmètre institutionnel de l’Union Européenne. Sans grand impact à court terme, la sortie effective devant avoir lieu au 31 décembre 2020, sur base de ce qui aura pu se négocier d’ici là en matière de douanes, immigration, etc…

Les deux architectes britanniques du Brexit les plus connus sont Nigel Farage et Boris Johnson. Commençons par le député européen Nigel Farage, qui depuis près de 30 ans (sur 40 ans au Parlement Européen) milite pour une sortie de l’UE à travers une série d’interventions parfois grotesques, parfois insultantes, parfois hilarantes à l’encontre de la bureaucratie et de l’anti-démocratisme des institutions européennes:

Cette récente interview s’est tenue ce 22 janvier. Farage y résume ses motivations et sa vision de l’avenir, insistant sur l’effet de suivi que le Brexit pourrait avoir sur les Italiens, notamment.

Et enfin cet épisode qui deviendra culte, la toute dernière intervention de Farage au Parlement Européen ce 29 janvier, qu’il arrive à terminer sans micro, censuré par la Présidente pour abus de drapeaux. Tout un symbole, vraiment.

Le phénomène Boris Johnson.

Nigel Farage et Boris Johnson, l’actuel Premier Ministre britannique, ont collaboré lors de la campagne du Brexit en 2016, remportée par une mince marge et à l’aide de quelques appuis douteux de l’entité Cambridge Analytica (1) sur lesquels je ne reviendrai pas ici.

Johnson est opposé à l’Union Européenne depuis au moins aussi longtemps que Farage, sa découverte de l’hypocrisie, de la gourmandise bureaucratique du “machin” datant de sa période de chef de bureau à Bruxelles pour le Daily Telegraph dans les années 90. En 2014, alors maire de Londres, il raconte cette période formatrice dans cette interview pour, évidemment, le Daily Telegraph:

Boris Johnson est, entre autres, un expert sur Winston Churchill qui est son modèle absolu. A écouter, cette conférence qu’il donne en 2014 dans une librairie lors de la parution de son livre “The Churchill Factor”.

Enfin, en français cette fois, cette émission sur la chaîne C Politique, en date du 26 janvier, qui fait le tour de Boris Johnson:

Ces deux hommes ont largement contribué à mettre le Royaume-Uni sur la route du Brexit, et à lui faire passer la porte symbolique de ce 31 janvier. A titre personnel, pour avoir vécu en Angleterre plusieurs années juste après l’entrée du RU dans ce qui était, à l’époque, le Marché Commun, cette volte-face obtenue par la mouvance nationaliste et conservatrice britannique n’est pas si surprenante, la souveraineté étant un facteur clé de la mentalité britannique.

Les classes moyennes urbanisées habituées à l’Europe ont raté le train lors du référendum de 2016, et ont eu peur de Corbyn lors des dernières élections. Elles ont peut-être vu en Johnson, aussi, un petit Churchill capable de mener à bien cette dangereuse mais exaltante entreprise d’un navire Britannique rompant les amarres d’une Union trop centralisatrice.

Alea jacta est, comme on dit en vieil anglais.

Et maintenant?

Il est trop tôt pour se faire une idée de l’impact du Brexit sur le RU comme sur l’UE, les vraies règles n’étant pas encore définies. Certains tentent quelques spéculations mais sans trop se mouiller (2). Des tensions sont prévues sur la Manche, le RU ayant annoncé qu’il restreignait sa zone maritime aux seuls navires de pêches britanniques. Un coup dur pour les pêcheurs du Nord de la France, déjà concurrencés dans leurs eaux par les pays voisins dotés de moyens de pêche disproportionnés par rapport à leurs propres côtes (Pays-Bas notamment), et désormais privés de la moitié britannique du Channel.

Le Brexit entraînera certainement des effets en chaîne, voire des tensions entre pays et des revendications “exitiennes” même si les nationalistes Italiens et Français sont nettement moins présents sur ce front qu’ils ne l’étaient voici deux ans. Et l’UE a largement de quoi se fissurer toute seule, sans l’aide des Britanniques mais cela ferait quand même grand plaisir à MM Farage et Johnson. Leur logique, en effet, repose sur des accords bilatéraux entre de nombreuses entités de taille comparable, plutôt qu’avec un accord unique avec une entité nettement plus grosse. En cela ils ont raison, et on leur souhaite bien du courage dans leurs négociations “gagnantes” avec les USA, la Chine et l’Inde…

Une chose est sûre: l’Histoire de l’Europe est loin d’être écrite et Boris Johnson, à voir son admiration pour le prolifique Churchill ainsi que son indiscutable culture littéraire, se voit certainement dans un rôle majeur pour le chapitre qui s’ouvre.

Liens et sources:

(1)

(2) https://www.lesechos.fr/monde/europe/brexit-population-industrie-finance-ce-que-perd-vraiment-lunion-europeenne-1167345#utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_lec_18h-20200129

A propos Vincent Verschoore

Animateur de Ze Rhubarbe Blog depuis 2008.

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